Divagation
à Elmo et Prune
Si tous les Généraux du Monde,
Les Amiraux de l'Onde,
Avaient un Chat sur les Genoux,
Ronronnante Bouillotte
Qui trotte, pelote et se frotte,
Ah ! quelle Paix pour nous !
Les Chats sont de vieux Philosophes
Posés sur des Étoffes
Qui se rient de Kant et Platon ;
Du Haut de ses sept Vies,
Que sont nos Questions, nos Envies,
Aux Yeux bleus d'un Chaton ?
Ma Chatte parfois me regarde
Dans ma Course hagarde :
« Pourquoi t'en faire, pauvre Humain ;
Crois-moi, suis mon Exemple :
Il suffit d'un Lit comme un Temple
Et du Chaud de ta Main.
Car la Vie est dans la Paresse,
L'Instant de la Caresse
Vaut plus que l'Or et le Diamant.
Toi qui te crois mon Maître,
Qui donc - mais pourras-tu l'admettre -
Me sert comme un Amant ? »
Et mon Chat renchérit sur elle :
« Que cesse la Querelle !
Je me souviens d'un Temps radieux,
D'une Fraîcheur de Crypte,
Je me souviens de cette Égypte
Où nous étions des Dieux. »
Si les Chats parlaient notre Langue,
Je crois que leur Harangue
Nous dirait des Mots plus subtils ;
Ou, Comble de Sagesse,
Profitant de notre Largesse,
Nous le cacheraient-ils ?
Mais si les Généraux du Monde,
Les Amiraux de l'Onde,
Avaient un Chat sur les Genoux,
Ronronnante Bouillotte
Qui trotte, pelote et se frotte,
Ah ! quelle Paix pour nous !